Newsletter n°1 du projet STePS
- Projet STePS

- 6 nov.
- 4 min de lecture
Introduction du projet STePS
Les policiers spécialisés dans les affaires de violences sexuelles sur mineurs sont quotidiennement confrontés à des récits, des images et des situations profondément éprouvantes. Ce travail, indispensable à la protection des enfants, peut entraîner chez ces professionnels un stress traumatique secondaire, encore peu étudiés en France.
Le projet STePS, financé par l’Agence Nationale de la Recherche, a pour objectif d’aider les personnels de police en concevant et en mettant en place une méthodologie spécifique de soutien destinée à ces personnels travaillant avec des mineurs victimes de violences sexuelles.
Objectifs de la recherche
Les objectifs de cette recherche sont triples :
Réaliser un état de l’art sur les violences sexuelles sur mineurs et le stress traumatique secondaire chez les personnes exposées à ces situations. En effet, peu d’articles scientifiques s’intéressent à l’évaluation du stress traumatique secondaire au sein d’institutions policières.
Proposer une analyse qualitative et quantitative du STS au sein de la Police nationale.
Mettre en place deux dispositifs de soutien, en collaboration avec les SSPO, dont l’efficacité sera comparée au travers d’un essai clinique randomisé, multicentrique, en simple aveugle. Il s'agit :
d'un dispositif de Photolangage® ;
d'un dispositif d’Analyse des pratiques professionnelles.
Le Photolangage est un outil utilisé à la fois dans des cadres thérapeutiques et de formation. Il propose un ensemble de photographies servant de support à la discussion au sein d’un groupe, permettant aux professionnels d’explorer collectivement les enjeux inhérents à leurs pratiques.
L’analyse des pratiques professionnelles réunit un petit groupe de professionnels dont les activités sont suffisamment homogènes et/ou interdépendantes. À partir de situations rencontrées dans leur expérience, un espace réflexif est ouvert, favorisant la mise en sens collective des difficultés rencontrées.
Premiers résultats
La première phase du projet, consacrée à l’état de l’art sur le stress traumatique secondaire, sa caractérisation, son étude au sein des forces de sécurité intérieure et ses différences avec le traumatisme vicariant, fait l’objet de deux publications actuellement en cours d’évaluation par les pairs dans des revues scientifiques internationales.
Pour la méta-analyse portant sur les conséquences de l’exposition aux violences sexuelles sur mineurs chez les policiers et les scientifiques de la police, une revue systématique a été menée. Pour recenser les publications pertinentes, nous avons déterminé :
les bases de données utilisées ;
les critères de recherche ;
les critères d’inclusion et d’exclusion.
Toutes les études qualitatives, quantitatives ou mixtes sur la santé mentale de policiers et de scientifiques de police confrontés, dans le cadre de leurs fonctions, aux violences sexuelles sur mineurs ont été prises en compte sur les plateformes suivantes (jusqu’en février 2025) : PubMed, PsycINFO/PsycARTICLE, Web of Science, Cairn, Cochrane, Embase et Biomed.
Sur 1826 articles identifiés, seuls 26 répondaient aux critères d’inclusion. L’échantillon total correspondait à 6358 personnes (52 % d’hommes). Aucune étude réalisée en France n’a été identifiée sur cette thématique en milieu policier. En Europe, 10 études ont été recensées (9 au Royaume-Uni et 1 en Allemagne).
Ces résultats — que nous vous présenterons prochainement — mettent en lumière les facteurs aggravants du STS, ses conséquences sur la vie personnelle, les mécanismes d’adaptation et les besoins de soutien.
Pour la deuxième phase du projet, soit l’étude qualitative et quantitative du STS chez les personnels de police français :
la phase d’entretiens qualitatifs en métropole est terminée ;
la phase quantitative débutera en 2026.
Les premiers résultats mettent en évidence une forte intensité émotionnelle liée à l’exposition à ces situations, pouvant se manifester par des rêves intrusifs ou des moments de sidération au sein de l’équipe de recherche. Les entretiens ont également montré le besoin chez ces professionnels d’exprimer l’impact de leur travail, de revenir sur des scènes marquantes et d’en construire progressivement le sens.
Par ailleurs, il apparaît que les personnels scientifiques mobilisent davantage un mode opératoire lié à la dimension technique de leur travail. Enfin, certains contenus se révèlent particulièrement marquant, notamment les sons, certaines formulations langagières ou encore les reconstitutions imaginées à partir des dossiers.
L’enjeu de la suite du projet est d’explorer comment les psychologues peuvent proposer des dispositifs de soutien adaptés — dont possiblement des dispositifs groupaux avec Photolangage.
Nous remercions chaleureusement la Direction Zonale Sud-Est, le SNPS, l’Office Mineurs, et bien entendu tous les participants.
Prochains Terrains
Début 2026, deux terrains seront ouverts :
les DROM-COM, dans le cadre de l’étude qualitative et quantitative;
les SSPO des DIPN concernées, pour la co-construction et l’évaluation des dispositifs de soutien.
Nous faisons l’hypothèse que les territoires ultramarins présentent des caractéristiques spécifiques susceptibles de faire émerger des formes particulières du STS. Par exemple, la reconnaissance publique des violences sexuelles sur mineurs a émergé plus tardivement en Polynésie (Hervouet, 2023). De plus, les structures de prise en charge multidisciplinaires (type UAPED) sont inexistantes, hormis à La Réunion, et les taux de violences intrafamiliales et de précarité y sont plus élevés que dans l’Hexagone (RAPPORT D’INFORMATION, 2023). Ces éléments constituent des facteurs de risque concernant l’exploitation sexuelle des mineurs (Bienvenu & Bouteyre, 2022), faisant des DROM-COM un terrain de recherche à ne pas négliger.
Ainsi, l’année 2026 s’annonce riche en terrains de recherche. Nous vous tiendrons informés de l’avancée du projet.
Quelles suites en 2026 ?
Ainsi, le projet STePS amorcera en 2026 plusieurs étapes :
Publication d’articles scientifiques ;
Analyse des entretiens qualitatifs et ajout des terrains en outre-mer ;
Lancement de l’étude quantitative à l’échelle nationale ;
Mise en place de l’étude comparée des dispositifs de soutien avec les SSPO.
Nous espérons que cette première newsletter vous aura plu. Si vous souhaitez que nous abordions une thématique du projet plus précisément, n’hésitez pas à nous en faire part à l’adresse suivante : steps@interieur.gouv.fr.
Enfin, plusieurs séminaires de recherche se tiendront à la fin de l’année 2025 et en 2026. Ils auront pour objectif de diffuser les résultats du projet, de renforcer les liens partenariaux entre les différents acteurs impliqués, et d’ouvrir la discussion scientifique dans un format favorisant le dialogue et l’échange autour de la complexité des enjeux explorés.
Références utilisées
Bienvenu, Anna, and Evelyne Bouteyre. “Exploitation sexuelle des mineurs et traumatisme : revue narrative de littérature.” Neuropsychiatrie de l’Enfance et de l’Adolescence, vol. 70, no. 6, 2022, pp. 327–35, https://doi.org/10.1016/j.neurenf.2022.06.003.
Hervouet, Lucile. Les violences sexuelles intrafamiliales sur mineurs en Polynésie française : parcours de personnes victimes et traitement institutionnel du problème. Ministère de la Justice, 2023, p. 151, https://www.justice.gouv.fr/sites/default/files/2023-10/lucile_hervouet_violences_intrafamiliales_sur_mineurs_PF.pdf.
RAPPORT DU GROUPE DE TRAVAIL SUR LA PROSTITUTION DES MINEURS. 2021, p. 189, https://solidarites.gouv.fr/rapport-du-groupe-de-travail-sur-la-prostitution-des-mineurs.

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